La Vie Au Soleil N°10 – Sept-Octobre 1950

Encore une définition du naturisme ! Par Henri Laverrière

Nous pouvons déjà collectionner les définitions du naturisme. M. Descazaux le définit excellemment comme une réaction contre les dégâts d’une civilisation. Sur un plan plus général, M. A Lecocq indique: « Tout ce qui oriente l’homme vers une vie naturelle ». Je citerai même l’agréable slogan de M. A. Gaillard: « La vie saine, simple, sage, sobre au soleil ».

Il est probablement impossible de définir le Naturisme en une phrase, comme la plupart des doctrines. De plus, le Naturisme n’a pas encore situé les limites de son domaine. Le but de cet article est d’en montrer un aspect nouveau.

Nous pouvons certainement dire que le Naturisme est né d’une réaction de l’individu tentant à limiter les dommages que nous apporte notre façon de vivre. Il a pu, à certaines époques, et dans certaines publications, se réduire à des discussions sur la manière de manger la salade, ou sur la surface ou la présence d’un slip, ou à des échanges de vues interminables sur les questions sexuelles; il peut encore actuellement servir de prétexte à certains périodiques visiblement à la recherche d’effets érotiques.
Le naturisme n’est pas cela.

Mais une définition trop large inclurait des éléments étrangers à son essence. Dans cette définition, je crois qu’il faut éviter l’emploi des mots « nature », « naturel » et dérivés, sous peine de soulever l’ironie de Molière, qui fait dire à Diafoirus que l’opium fait dormir, parce qu’il a des vertus dormitives.
Une notion s’est dégradée récemment dans le Naturisme: c’est la place qu’il donne aux répercussions de notre comportement sur l’espèce humaine, et non plus tant sur l’individu. Cette notion prend une importance qui grandit rapidement. Je ne peux mieux l’expliquer que par deux exemples.

– Vivre dans la poussière, dans le bruit, dans les trépidations, vivre d’aliments « chimiques », etc., est assez bien supporté par l’individu, sa vie durant. A l’échelle de l’Espèce, les résultats apparaissent désastreux.

– La réaction de l’individu contre l’attaque microbienne est toujours « spécifique ». La médication est loin de l’être, et elle a tendance à supprimer la réaction individuelle. Autrement dit, si j’ai à choisir, pour combattre une maladie microbienne dont je souffre, entre ma « self réaction » et une défense apportée de l’extérieur sous forme de médicaments, je choisirai toujours ma self réaction, ne demandant d’aide extérieure que dans la mesure ou elle est nécessaire. Car l’aide extérieur tend à supprimer l’auto-défense.

Pour guérir mon rhume de cerveau, mon médecin m’ordonne 500 000 unités de pénicilline; il a sans doute raison, si le but qu’il se propose est de me guérir rapidement et complètement par les méthodes les plus efficaces. Il reste, ce faisant, dans les chasses gardées de la Médecine. Si, à l’avenir, d’autres rhumes de cerveau non soignés aux antibiotiques évoluent mal parce que mon auto-défense est devenue paresseuse, si mes descendants n’ont plus du tout d’auto-défense parce que leur organisme a pris l’habitude d’une aide extérieure immédiate et totale, il ne s’agit plus de Médecine, mais d’une Hygiène de l’Espèce.

Vu sous cet angle, le Naturisme pourrait être défini comme une Hygiène de l’Espèce. C’est, je crois, sa force principale que de signaler et de combattre les dangers que font courir à l’Espèce humaine certains comportements qu’on ne peut guère appeler des bienfaits de la Civilisation.

Article recopié par l’Association Naturiste Phocéenne dans son travail sur l’histoire du naturisme

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